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Semaine 13 : Un accueil féerique
Demain, nous atterrissons en Mauritanie dans la région où eut lieu, en 1816, le tragique échouage de la frégate « La Méduse » rendu tristement célèbre par son fameux radeau et la toile de Géricault. Les lieux ont ici des noms évocateurs : la baie des autruches, des hyènes, des pélicans, la pointe des maures, des marais, du désert, des crabes, des langoustes ou des coquilles, le banc du goéland ou du lézard. D’autres font référence aux navires d’étude de missions hydrographiques françaises qui étudièrent la région entre 1817 et 1910 comme « Le Lévrier », « Le Trident », « L’Ardent », « Le Dumont d’Urville », « L’Archimède », « L’Etoile » ou « La Bayadère ».
A nous de découvrir le Cap Blanc où vit la plus importante colonie de phoques moine, persécutés jadis, menacés aujourd’hui, ils ont délaissé les plages de sable pour se réfugier près des falaises. Cette immense baie du Lévrier large de 20 milles et haute de 30 avec sa faible profondeur et ses forts courants. Nouadhibou, son port minéralier et le trafic incessant des cargos, ses centaines de chalutiers, au mouillage, à couple par dizaine, pendant la trêve de pêche de deux mois au milieu d’épaves qui ont trouvé là un repos définitif. La baie de l’Etoile pratiquement fermée où s’est installé un centre de pêche sportive ;
Au Nord, la baie de l’Archimède et le désert qui vient y mourir ; à l’est, le parc national du Banc d’Arguin crée à l’initiative de naturalistes tels Théodore Monod, ses vasières et ses innombrables bancs de sable et au nord, les îles d’Arguin, du Trident et de l’Ardent. La nature semble s’être donnée rendez-vous là, dans cette étrange et étonnante région où la richesse ornithologique traduit celle du milieu halieutique.
Nous profitons enfin de l’alizé de nord-est. Nous filons sous génois tangonné à 7 nds de moyenne, des pointes à 9,5 nds sur les surfs. Quelques dauphins sont déjà présents pour le changement de quart de 1 h du matin. Progressivement, c’est une trentaine puis une cinquantaine qui les rejoigne et nous accompagne. Ils jouent à la poupe de Samana, puis telles des étoiles filantes sous-marines prennent une accélération fulgurante, à 3 ou 4 de front, traçant un sillage blanc le long de la coque, pour venir sauter à l’étrave en un éclair lumineux. Le zooplanton, semblable à des billes sauteuses phosphorescentes, rebondit à l’infini, à la surface de l’eau, tentant d’échapper à ces dauphins euphoriques. Pendant plus d’une heure, nous assistons à un véritable festival, formidable ballet aquatique. Tout l’équipage est maintenant sur le pont, à savourer ce spectacle magnifique et inoubliable.
De merveilleuses minutes d’enchantement dans nos mémoires pour toujours.
Semaine 14 : Immersion amrig
Au lever du soleil, nous embarquons à bord d’une lanche. Cette barque à voile, non pontée, de 12 m est le bateau des Imraguen, les pêcheurs du désert. A bord, Mamhoud, Ali, Cher, Mohammed, Arza, âgés de 11 à 23 ans nous accueillent. Nous partons pour le tour de leur île, l’île d’Arguin. Le premier bord nous amène tout près des chacals sur la dune du continent. Le deuxième nous permet de contourner le banc en forme de lune du Nord de l’île. La grand voile latine nous propulse efficacement.
Une grande jante de roue sert de brasero. Au milieu des braises de charbon de bois, dans la petite théière bleue se prépare le 1er thé de la journée. Il sera versé et reversé dans les petits verres jusqu’à obtention de la mousse traditionnelle en surface. Puis le tichtar, mulet séché est grillé sur la braise et ce sera le petit déjeuner. La marée est basse. Nous rasons sur bâbord le banc. A notre passage, quelques raies guitares déguerpissent à toute vitesse. Les oiseaux sont là. Nous observons à la jumelle quelques-unes des multiples espèces présentes sur le banc d’Arguin : les petits bécasseaux fouillent la vase inlassablement, les flamants roses s’envolent, les pélicans, jusqu’à 3 m d’envergure pour certains, déploient leurs ailes. Et sur tribord, d’énormes dauphins souffleur chassant le mulet nous dépassent doucement et majestueusement.
Nous affalons la voile latine, nous échouons sur le banc et la pêche commence. Elle se pratique à pied dans les eaux peu profondes à l’aide du « filet à épaule » enfilé sur 2 grands bâtons. 2 hommes se mettent à l’eau avec un bâton chacun. Mamhoud, le jeune amrig, progressant à 4 pattes puis marchant en s’enfonçant jusqu’aux genoux dans la vasière, tape le sol pour rabattre le poisson. Les 2 pêcheurs déroulent le filet en arc de cercle, tapent la surface de l’eau avec leur bâton, puis encerclent les poissons. Les poissons pris dans les mailles du filet sont attrapés, leurs ouïes sont ouvertes puis Mamhoud, ayant rejoint les pêcheurs, les enfile sur un gros fil de nylon. Nos amis renouvellent cette pêche 3 fois. La pêche est belle, 40 mulets jaunes, d’une taille de 80 cm, de 3 à 5 kg chacun.
Nous descendons le chenal du sud-ouest. Amar prépare le déjeuner. Il écaille et vide un poisson, nous en offre les œufs, la poutargue, puis le coupe en grosses tranches. Il sera cuit dans une grande casserole sur le brasero déplacé sur l’avant de la lanche pour activer le feu. Le mulet sera délicieux, mangé à pleine main dans un grand plat. Puis, nous tenterons de faire des boulettes avec le riz cuit dans le bouillon du poisson. Pas facile ! Nous voici rassasiés. Un thé et nous contournons la pointe sud de l’île et son sable blanc éblouissant. 2 nouveaux bords et nous regagnons Agadir, l’un des 7 villages imraguen. 1000 personnes vivent ainsi en autonomie, se nourrissant principalement de poisson.
Pour combien de temps encore ?
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Le premier thé de la journée
Les feuilles de thé vert, oarga sont rincées puis réchauffées dans la théière. Le sucre est ajouté et le thé nous est offert dans de petits verres. Trois fois de suite.
Le 1er thé est celui de la vie, le 2ème, celui de la chance et le 3ème, celui de la mort.